Fin
des années 1970 : les "nouveaux philosophes" envahissent les médias.
Ils s’appellent André Glucksmann, Maurice Clavel, Jean-Marie Benoist et
surtout Bernard-Henri levy. Ils seront bientôt suivis d’amis proches sur
le plan idéologique dont au premier rang, Alain Finkielkraut et Pascal
Bruckner. Trente ans plus atrd, que reste-t-il de leur rélexion ? Si les
membres de ce courant ont incontestablement marqué la scène pubique
française, leur héritage fait débat sur le plan philosophique. C’est sur
ce terrain que Daniel Salvatore Schiffer a choisi d’exercer son regard
critique. Essai aux accents pamplétaires, Critique de la déraison pure,
référence directe au maître ouvrage d’Emmanuel Kant, dresse un bilan
cinglant de la pensée léguée par « les intellectuels médiatiques ». Loin
de se borner à la mise en cause de leurs postures, ce livre engage,
pour la première fois, une réflexion de fond sur les dérives et les
manipulations logées au coeur de leur philosophie (présentation de l’éditeur).
Voilà
une présentation qui en dit long sur le contenu du livre et chose rare,
je suis d’accord. Comme pour beaucoup d’entre nous, le titre m’a fait
penser sans hésitation à la célèbre Critique de la raison pure d’Emmanuel Kant et j’ai voulu savoir pourquoi Daniel Salvatore Schiffer avait choisi ce titre. Aussi, quel ne fût mon enthousiasme lorsque Blog-O-Book a retenu ma demande pour ce partenariat proposé par les éditions François Bourin Editeur. A la lecture de Critique de la déraison pure,
ce qui m’a séduit dans ce pamphlet car il s’agit bien à mon avis d’un
pamphlet, ce sont bien les enjeux soulevés par l’auteur. En effet, si
l’on se penche sur la question de savoir ce que sous-entend l’expression
"nouveaux philosophes", on peut légitimement se demander quels intérêts
ces derniers ont servi pendant ces trente dernières années pendant
lesquelles, pour reprendre les termes de Daniel Salvatore Schiffer, le "carré d’as"
composé des célèbres André Glucksmann, Alain Finkielkraut, Pascal
Bruckner et Bernard-Henri Levy, a occupé le devant de la scène
médiatique. La réponse de l’auteur est sans appel : aucun ou presque. Fondant
son argumentaire sur des références nombreuses et justifiées, Daniel
Salvatore Schiffer démontre de façon indiscutable, la superficialité de
ces penseurs modernes. Pourtant, s’il apparait à certains que cet essai
peut être le signe d’une vieille rancoeur, il faudra reconnaître qu’il
n’y a pas de fumée sans feu. Et l’auteur explique d’ailleurs avec
justesse que son livre n’a pas pour objectif le discrédit bête et
méchant de cette catégorie d’intellectuels : il n’est pas question ici
de faire de la rhétorique mais de réfléchir à l’impact des déclarations
faites dans la presse ou aux médias. Car c’est bel et bien dans cette
optique que Daniel Salvatore Schiffer met en lumière "la faillite intellectuelle des nouveaux philosophes et de leurs épigones".
Car enfin, s’il suffit d’avoir des amis bien placés et de maîtriser
l’art oratoire pour être considéré comme nouveau philosophe, alors la
philosophie française a du souci à se faire... Or, et cela n’engage que
moi, je crois que nous n’en sommes pas encore là...Si l’auteur nuance parfois ses propos, il se montre souvent cinglant à l’égard de Bernard-Henri Levy qui lui provoque une évidente allergie. Enumérant scrupuleusement les bourdes et les scandales de celui-ci, Schiffer démantèle savamment l’édifice que le philosophe a bâti autour de sa personne. Il n’épargne aucun détail, à commencer par son ouvrage intitulé De la guerre en philosophie paru en février dernier et dans lequel BHL cite Botul, un philosophe imaginaire ! Cette entrée en matière ne peut qu’augurer la suite du livre et le lecteur est averti : pas de pitié pour BHL et Cie. Bref, de scandales en omissions volontaires, le BHL national n’en finit pas de décevoir, voire débecter Schiffer. C’est vrai que ces nouveaux philosophes sont agaçants à envahir les médias et la presse : guerre, religion, philosophie, politique, ils savent tout, parlent de tout, mais que disent-ils en réalité ? Telles sont au final les questions posées par Schiffer. Car le lecteur n’est pas dupe : il est libre de croire ou non les informations que lui servent à outrance les médias. Non pas que ces nouveaux philosophes ne racontent que des inepties. Juste qu’il ne faut pas oublier qu’il est donné à tout un chacun, philosophe ou non, de réfléchir tout simplement. Vouloir donc "sauver" la philosophie française du naufrage me semble un peu ambitieux. Toujours est-il que cet essai, tout aussi intéressant que documenté, m’a permis de (re)découvrir des penseurs qui ont marqué la philosophie universelle...
Pour l’anecdote, rendez-vous sur cet article de la République des livres de Pierre Assouline pour savoir pourquoi la publication du livre, initialement prévue aux éditions Fayard a été annulée.
Dédicace : "A Nadine »
Citations : "La
critique de la raison finit donc nécessairement par conduire à la
science ; l’usage dogmatique de la raison sans critique ne mène, au
contraire qu’à des assertions sans fondements, auxquelles on en peut
opposer de tout aussi vraisemblables, et par suite, au scepticisme." Emmanuel kant, Critique de la raison pure
Enfin, merci encore aux éditions François Bourin et à Blog-o-Book de m’avoir offert ce livre que j’ai bien l’intention de relire...
Titre : Critique de la déraison pure
Auteur : Daniel Salvatore Schiffer
Titre complet : Critique de la déraison pure. La faillite intellectuelle des « nouveaux philosophes » et de leurs épigones.
Éditions : François Bourin Editions
Date de parution : Mai 2010
Nombre de pages : 354 p.
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