Ce roman posthume de Jacques Chessex a été rédigé par l’auteur quelques temps avant sa mort, alors même qu’il racontait celle du marquis. Entre la biographie et la fiction, Le dernier crâne de M. Sade, s’impose un peu comme le message testamentaire de Chessex. Pourquoi l’auteur a t-il décidé d’écrire son ultime roman sur DFA de Sade, on ne le saura jamais. Mais ce qu’on ressent dans tous les cas, c’est l’admiration que voue l’auteur pour ce personnage libertaire, intègre et provocateur.
Alors que la première partie du roman décrit en détails les derniers moments du marquis, la seconde partie relève purement de la fiction. On ne sait pas vraiment d’où viennent les légendes du dernier crâne de Sade. Toujours est-il que l’histoire m’a plu malgré certains passages pornographiques (voire scatologiques). Navigant entre l’écriture romanesque et fantastique, Chessex nous offre ici un ultime roman à l’atmosphère mystérieuse. Bref, j’ai trouvé que ce conte morbide couronnait avec succès la carrière de l’écrivain. A lire donc!
Anecdote : Dans la troisième aventure du crâne, Chessex parle de l’affaire de Marseille (1772) lors de laquelle le marquis est accusé d’empoisonnement (il aurait distribué des dragées aprodisiaques à des prostituées lors d’une orgie). On le brûle symboliquement en effigie sur la place des Prêcheurs à Aix-en-Provence, là où se trouve mon ancien collège!
Une explication sur la légende du crâne ? Dans son commentaire, Thracinée souligne l'évocation du crâne de Yorick dans Hamlet. Peut-être est-ce là que se trouve la réponse à nos interrogations sur l'origine des légendes autour du crâne? Dans cette célèbre scène de Shakespeare, Hamlet se retrouve avec des fossoyeurs qui creusent la tombe d'Ophélie. Discutant avec eux sur le sens de la vie et de la mort, le héros tombe avec émotion sur le crâne de Yorick, le bouffon qui l'amusait dans son enfance. Il s'écrie alors : Hélas, pauvre Yorick! En faisant référence au crâne de Yorick, Chessex nous laisse t-il un indice sur son questionnement par rapport au sens de la vie et de la mort ?
Citation : "Cette
chaleur est occasionnée par des exhalations de sources d’eau
bouillonnante, dont la fumée, s’attachant aux murs, les enduit de
différentes couches de nitre et de soufre. Il serait difficile de tenir
longtemps la main à l’endroit d’où s’exhale la vapeur, tant est violent
le degré de chaleur. Ces souffres sont pénétrants à un point qui ne
s’exprime pas ; ils rongent et consument tout ce qu’ils touchent. On en
fait aisément l’expérience en en emmenant dans du papier dans sa poche ;
on est presque sûr de trouver le papier consumé en arrivant chez soi.
Il ne faut jamais risquer de vouloir en envoyer dans une lettre, elle
serait infailliblement consumée en arrivant à destination." D.A.F. de Sade. Voyage à Naples.
Première phrase : "Quand
cette histoire commence, en été 1814, Donatien Alphonse François, Marquis de Sade, est enfermé depuis 11 ans à Charenton, dans le
Val-de-Marne, à la limite sud-est de Paris, un hospice d’aliénés placé
sous la surveillance vétilleuse du Ministère de l’Intérieur. »
Extrait : "- Il disait qu’il ne ferait pas de vieux os. Qu’on aurait son corps, pas sa tête. C’était confus. A la fois très compréhensible et très obscur. A la fin j’ai saisi quelques mots, qu’il a répété plusieurs fois : "Mon dernier crâne! Mon dernier crâne!" Ce qui montre bien l’incohérence où peut sombrer cet impie." p.22
Extrait : "- Il disait qu’il ne ferait pas de vieux os. Qu’on aurait son corps, pas sa tête. C’était confus. A la fois très compréhensible et très obscur. A la fin j’ai saisi quelques mots, qu’il a répété plusieurs fois : "Mon dernier crâne! Mon dernier crâne!" Ce qui montre bien l’incohérence où peut sombrer cet impie." p.22
Auteur : Jacques Chessex
Editeur : Grasset et Fasquelle
Parution : Décembre 2009
Nombre de pages : 170 p.
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