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La généalogie de la morale - Friedrich Nietzsche

"Nous avons besoin d'une critique des valeurs morales, il faut commencer par mettre en question la valeur même de ces valeurs, et cela suppose la connaissance des conditions et des circonstances de leur naissance, de leur développement, de leur modification (la morale comme conséquence, comme symptôme, comme masque, comme tartuferie, comme maladie, comme malentendu; mais aussi la morale en tant que cause, remède, stimulans, entrave ou poison), bref, une connaissance telle qu'il n'en a pas existé jusqu'à présent et telle qu'on ne l'a même pas souhaitée. Car on a considéré la valeur de ces valeurs comme donnée, comme réelle, comme au delà de toute mise en question; jusqu'à présent on n'a pas hésité le moins du monde à donner à l'homme "bon" une valeur supérieure à celle du "méchant", une valeur supérieure dans le sens du progrès, de l'utilité, de la prospérité de l'homme en général (y compris l'avenir de l'homme). Et si le contraire était vrai ? Et s'il n'y avait chez le "bon" aussi un symptôme de régression de même qu'un danger, une séduction, un poison, un narcotique, qui permettrait au présent de vivre en quelque sorte aux dépens de l'avenir, peut-être avec plus de confort, moins de risques, mais aussi dans un style plus mesquin, plus bas?... De sorte que ce serait la faute de la morale si l'espèce humaine n'atteint jamais le plus haut degré de puissance et de splendeur auquel elle puisse prétendre? De sorte que la morale serait le danger des dangers ?" (extrait de l'Avant-propos, p. 14-15). Voilà, ce qui résumerait le mieux l'objet de cet essai de Friedrich Nietzsche...

Prolongeant sa réflexion sur Par delà bien et mal, cet "écrit polémique" met en lumière l'art de la rhétorique du philosophe allemand. Invitant ses semblables à reconsidérer les valeurs morales contemporaines, Nietzsche par une pirouette bien sentie, renverse la donne et interroge sur le bien-fondé de la morale occidentale. Délaissant cette fois-ci ses habituels aphorismes au profit d'un développement sous forme de dissertations, Nietzsche décline sa "Généalogie de la morale" en trois essais :"le bon et le mauvais" (ou la morale des maîtres contre celle des esclaves), "le ressentiment" (ou la mauvaise conscience ou la culpabilité qui forge la morale des esclaves) et "les idéaux ascétiques" (critique de l'ascétisme qui se nourrit de la morale des esclaves)...

    Crédit photo : Friedrich Nietzsche, yourbest100.com

Je ne m'étendrai pas sur l'interprétation de cette Généalogie de la morale car le web fourmille de pistes qui se rejoignent (ou pas). D'ailleurs, mon avis peu éclairé ne serait d'aucune utilité. Mon compte-rendu portera plutôt sur mon expérience de lecture. Nietzsche en est conscient, sa pensée est tortueuse et l'interprétation de ses textes exige un effort, une compétence que ne possède pas à priori l'homme moderne : "savoir ruminer". Certes, il n'a pas tort mais en même temps avouons que le style pamphlétaire du philosophe, ses écrits sibyllins et son esprit d'escalier sont assez éloignés de la pensée systématique généralement associée aux philosophes. En effet, Nietzsche fait plus figure d'un écorché vif que d'un philosophe. Alors c'est vrai, comme le souligne le philosophe allemand : "pour pouvoir pratiquer la lecture comme un art, une chose avant toute autre est nécessaire, que l'on a parfaitement oubliée de nos jours - il se passera encore du temps avant que mes écrits ne soient lisibles -, une chose qui nous demanderait presque d'être de la race bovine et certainement pas "un homme moderne", je veux dire : savoir ruminer..." (extrait de l'avant-propos, p. 17). Mais pas seulement aurais-je envie de dire car si on retourne la question, n'incombe t-il pas aux philosophes (qui se considèrent souvent éclairés) de savoir transmettre clairement les concepts qu'ils ont eux-mêmes élaboré ? Hum... La question est lancée et moi, je retourne à mes ruminations...

Pour aller plus loin sur le sujet, je vous invite enfin à lire cet excellent billet du Petit Vagabond et si vous êtes tentés par cette lecture, notez que vous pouvez l'acheter sur Amazon via le lien suivant : La généalogie de la morale.

  • Titre : La généalogie de la morale
  • Sous-titre : Un écrit polémique
  • Titre original : Zur Genealogie der Moral. Eine Streitschrift
  • Auteur : Friedrich Nietzsche
  • Traducteur : Isabelle Hildenbrand et Jean Gratien
  • Éditeur : Folio
  • Collection : Folio Essai
  • Date de parution : Mars 1994 (date de parution originale : 1887)
  • Nombre de pages : 212 p.
  • ISBN :2-07-032327-7
  • Couverture : La croix, Eugen Schönbeck, Musée de la ville de Strasbourg

Mémoire de mes putains tristes - Gabriel Garcia Marquez

A ce singulier bâtonneur de dépêches du Diario de La Paz, rien n'est moins légitime que de vouloir s'offrir à une pucelle pour son quatre-vingt-dixième anniversaire. Mais que peut donc motiver un tel désir au crépuscule d'une vie ? Cherche t-il à retrouver sa jeunesse perdue ? A t-il une revanche à prendre sur la vie ? Ou est-ce seulement une lubie de vieux ? Peut-être les 3 à la fois ? Grâce à sa prose unique ancrée dans un réel imaginaire, Gabriel Garcia Marquez, grande figure du réalisme magique (cf. l'incontournable Cent ans de solitude), explore encore avec ce Mémoire de mes putains tristes, deux de ses thèmes de prédilection : la solitude et la mort (cf. par exemple L'amour au temps du choléra). Prêtant à son attachant vieillard une singulière jeunesse articulée autour de ses "putains", "Gabo" comme à son habitude, envisage avec tendresse et poésie les vieux jours de son héros nonagénaire... Mais il n'en oublie pas pour autant ses caractères féminins toujours très habités à l'image de Rosa Cabarcas, cette mère maquerelle qui, bon gré, mal gré sera au final, la putain des putains tristes du vieux bâtonneur... Ce texte n'est assurément pas le texte le plus marquant de l'auteur colombien mais pour qui aime sa verve et son flot, ce mémoire à la fois nostalgique et plein d'amour, saura divertir un instant les esprits les plus chagrins...

Enfin, si vous vous laissez tenter par cette lecture légère, vous pouvez vous procurer le livre sur Amazon via le lien suivant : Mémoire de mes putains tristes


  • Titre : Mémoire de mes putains tristes
  • Titre original : Memoria de mis putas tristes
  • Auteur : Gabriel Garcia Marquez
  • Traducteur : Anne Morvan
  • Éditeur : Le livre de poche
  • Date de parution : Août 2006
  • Nombre de pages : 157 p.
  • ISBN : 978-2253-116844
  • Couverture : Photographie de Gueorgui Pinkhassov (détail). Magnum Photo

Kafka - David Zane Mairowitz et Robert Crumb

L’œuvre cauchemardesque héritée de Franz Kafka a alimenté bien de thèses et de débats parmi les intellectuels de notre siècle. A tel point que l''adjectif "kafkaïen" est passé dans le langage courant. Mais que signifie exactement ce terme trop souvent galvaudé ? Qui se cache derrière l'auteur fuyant ? On connait Kafka pour son angoisse de l'aliénation et son délire de persécution. En témoignent ses singuliers récits comme La Métamorphose, Le Procès ou La Colonie pénitentiaire. Mais au delà de ces aspects, Kafka est aussi réputé pour sa relation ambivalente aux femmes, sa relation complexe à la Tchécoslovaquie et son désamour, voire sa terreur pour la figure du père. Comment s'est écrite la légende kafkaïenne ? Comment la République tchèque a t-elle enfin reconnu son fils étrange ? Publiée pour la première fois aux États-Unis en 1993, cette étude biographique "for beginners" de David Zane Mairowitz se démarque des productions prolifiques sur Kafka par ses propos pertinemment documentés et ses illustrations uniques signées par Robert Crumb...

Kafka de David Zane Mairowitz, une biographie richement documentée

      © Robert Crumb

Nul n'est besoin d'être "kafkologue" pour savoir que Kafka était complexe sur bien de points. Comme le souligne David Zane Mairowitz grâce à l'ancrage de son travail dans le contexte politique et historique du ghetto de Prague pendant l'Empire, l'un des principaux facteurs de l'auto-dénigrement de Kafka vient pour une grande part de l'environnement socio-culturel dans lequel il a baigné toute sa vie. En effet, "Pour quelqu'un comme Kafka, Thèque de langue allemande, se constituer une identité claire n'était pas des plus facile. Il va sans dire que, pour un juif, la vie était un équilibre difficile à trouver dans un tel environnement. On s'identifiait d'abord à la culture allemande, mais on vivait parmi les Tchèques. On parlait allemand parce que c'était proche du yiddish et que c'était la langue officielle de l'Empire. Le nationalisme tchèque prenait l'ascendant sur la domination allemande et, de façon générale, les Allemands traitaient les Tchèques avec mépris. Et bien sûr, tout le monde haïssait les juifs." A cet égard, difficile de comprendre l'auteur sans s'attacher à cet aspect. Vient ensuite la question l'enfermement liée au ghetto de Prague, "cellule forteresse" de Kafka et le mythe antisémite du "meurtre rituel" qui plonge Kafka dans une "dualité entre la mélancolie la plus noire et l'humiliation de soi" presque toujours à l’œuvre dans ses récits. Citons encore la figure terrible du père contre laquelle Kafka n'a jamais osé se révolter (cf. Lettre au père qui contient en substance toute l'essence de la littérature kafkaïenne et qui n'a jamais trouvé son destinataire) et la relation ambigüe aux femmes de Kafka (cf. déni de ses désirs qu'il juge comme sales). Autant d'éléments fondateurs de la personnalité de Kafka que Mairowitz revisite en profondeur en s'appuyant sur des faits précis et sur l'étude poussée des textes de l'auteur praguois. Bref, une étude passionnante qui malgré quelques longueurs à mon goût (cf. la relation de Kafka avec les femmes) relève autant d'une démarche littéraire motivée que d'une démarche documentaire perspicace...

Kafka selon Robert Crumb, une biographie pertinemment illustrée qui magnifie l'étude de Mairowitz

    © Robert Crumb

Et parce que c'est toujours un exercice difficile que d'assurer une vraie cohérence entre le texte et les illustrations, on saluera vivement la superbe interprétation graphique de Robert Crumb, à la fois fidèle à l'esprit de l'univers kafkaïen et intelligente par la sélection des séquences à illustrées... Pour conclure, voici un titre découvrir de toute urgence...

Enfin, si votre librairie est en rupture de stock, notez que vous pouvez vous procurer ce livre sur Amazon via le lien suivant : Kafka.

  • Titre : Kafka
  • Scénario : David Zane Mairovitz
  • Illustrations : Robert Crumb
  • Adaptation française : Jean-Pierre Mercier
  • Éditeur : Actes Sud
  • Collection : Actes Sud BD
  • Date de parution : janv. 2007 (parution originale : 1993)
  • ISBN : 978-2-7427-6573-7
  • Crédits photographiques : © Robert Crumb

L'ascension du Haut Mal - David B

Lorsque le premier tome de la série parait en 1996, cela fait déjà 20 ans que David B. réfléchit à la façon dont il va raconter son histoire : l'épilepsie de son frère, la détresse de sa famille face à la maladie, ses souvenirs d'enfance, l'histoire de ses aïeuls, comment allait-il donner corps à tous ces souvenirs dans un récit qui tienne la route ? Comment mettre son art au service d'une autobiographie qui n'en est pas tout à fait une ? Comment laisser s'exprimer son incroyable univers fantasmagorique et onirique sans nuire au récit de la douloureuse et véridique Ascension du Haut Mal vécue par sa famille ? C'est le tour de force que David B. a réussi avec cette riche bande-dessinée : œuvre cathartique s'il en est, cette renversante série ne se contente pas d'une narration linéaire et descriptive, elle raconte aussi sa propre histoire à travers la construction artistique de son géniteur... 

L'Ascension du Haut Mal, une œuvre pionnière en son genre...

Parfait exutoire à ses angoisses et sa colère, le dessin comme on l'apprend dans la BD a toujours été pour David B., alias Fafou, un refuge protecteur où il pouvait laisser libre cours à son imagination débordante : son univers noir et torturé peuplé de monstres et de fantômes, ses épopées guerrières à la gloire de Gengis Khan, ses rêves abscons et ses fantasmes de savant fou ont toujours aidé Fafou à évacuer les souffrances causées par la maladie de son frère. Aussi, lorsqu'il décide de raconter son Ascension du Haut Mal, c'est naturellement dans ses fantasmes guerriers grassement teintés de symbolisme que David B. puise son inspiration. Les représentations mentales de l'enfant s'imposent alors comme technique narrative, la BD autobiographique prend une dimension différente car l'auteur évolue en même temps qu'il se raconte...

    © David B

Les aplats de noir de David B. : une technique maîtrisée qui colle au propos

C'est vrai, les dessins de David B. sont saturés de noir et surchargés de symboles. Ses personnages sont caricaturaux, ses mondes imaginaires torturés. En même temps, c'est ce qui donne son âme au récit car ils créditent le regard impuissant de l'enfant face à ses propres peurs, son incompréhension et son sentiment d'injustice. Si les souvenirs sont difficiles à restituer parce qu'ils sont inégaux, imprécis, diffus, le dessin de David B. parce qu'il trouve son origine à l'époque des faits relatés, a ce pouvoir d'exhumer le passé en le réinventant. Et ce que les mots ne peuvent parfois exprimer, le dessin le fait de façon presque despotique. Alors c'est vrai aussi : soit on aime, soit on aime pas. Personnellement, ce travail m'a particulièrement touché car à travers la richesse des dessins de David B., j'y retrouve une infinité de références qui ont participé à la création de mon propre imaginaire... A découvrir absolument !

     © David B

Pour finir, je vous invite à lire cet intéressant entretien de David B. sur BD Paradisio pour mieux comprendre la démarche de David B.
  • Titre : L'ascension du Haut Mal (intégrale)
  • Auteur : David B
  • Éditeur : L'Association
  • Date de parution : Novembre 2011
  • Nombre de pages : 400 p.
  • ISBN : 978-2844144362
  • Crédits photographiques : © David B

Bluesman - Rob Vollmar & Pablo G. Callejo

Lem Taylor, ancien pasteur reconverti à la guitare, et Ironwood, pianiste chevronné, parcourent ensemble les campagnes américaines pour vendre leurs talents. Si vivre de sa musique a toujours été difficile en tous lieux et en tous temps, être noir en plus en ces fins d'années 20 aux États-Unis est d'autant plus compliqué. Rompus par la fatigue et par la faim, c'est souvent le ventre creux et les poches vides que les deux compères s'endorment épuisés dans les granges ou dans les bois. Jusqu'au jour où ils trouvent enfin leur public dans juke-point paumé de Hope. Employant tout leur art au service d'une musique endiablée, ils enflamment de leur blues habité la piste de danse et parviennent à décrocher une promesse d'enregistrement pour l'un des studios les plus en vogue de l'époque. N'osant croire que la chance leur sourit, les deux musiciens ont une semaine pour rejoindre Memphis et pour réaliser leur rêve...

Bluesman de Rob Vollmar, une grandiose fiction sur la tradition du bluesman itinérant

Seule la perspective de trouver un sort meilleur à celui des ramasseurs de cotons "poussaient ces musiciens à prendre la route, à mettre un pied devant l'autre pour trouver le juke-point suivant, celui qui paierait plus que le précédent. Car aussi certainement qu'il semblait y avoir de l'espoir au coin du prochain virage, il ne faisait aucun doute qu'une catastrophe avait autant de chances de parvenir avant qu'ils n'arrivent..." (p.44, extrait de The Roots of British R&B, Blin Lemon Jefferson to T-Bone Walker, Sheldon Doldoff, Early Rock Magazine, Title 37, février 1966). En effet, la vie du bluesman itinérant est loin d'être facile. Boudés par les uns ou encensés par les autres, ces musiciens vagabonds "inspirés par le diable" forcent autant le respect que l'aversion. Dans le contexte de ségrégation qui est celui des Etat-Unis des années 20-30, pas étonnant que la quête hasardeuse au succès des bluesmen s'accompagne d'une vie misérable et dangereuse. Avec cette histoire, Rob Vollmar réhabilite brillament la tradition souvent méconnue du bluesman itinérant. Servi par un scénario noir, brutal et émouvant, Bluesman convie le temps d'une danse débridée à un mémorable voyage dans le temps...

    © Pablo G. Callejo

Bluesman, un remarquable graphisme en noir et blanc

Si la course poursuite haletante imaginée par Vollmar se révèle être un bijou d'efficacité, elle tire aussi sa force des superbes planches en noir et blanc de Pablo G. Callejo : les expressions des personnages, le contraste parfaitement maîtrisé des décors, le rythme des séquences tantôt ralenti ou accéléré, ont un rendu incroyable. On se sent étourdi par les vapeurs d'alcool du juke-point, on entend résonner les complaintes des musiciens, on a envie de se trémousser sur la musique... bref, on est captivé par le remarquable travail d'illustration du dessinateur espagnol et lorsque la lecture se termine, on a qu'une envie : écouter un bon vieux morceau de blues et relisant l'histoire de Lem et Wood...


     © Pablo G. Callejo

Maintenant, si je vous ai donné envie de lire cette intégrale, vous pouvez l'acheter sur Amazon via le lien suivant : Bluesman : Edition définitive

  • Titre : Bluesman (intégrale)
  • Scénario : Rob Vollmar
  • Illustrations : Pablo G. Callejo
  • Éditeur : Akileos
  • Collection : Regard noir & blanc
  • Date de parution : Avril 2009
  • Nombre de pages : 206 p.
  • ISBN : 978-235574-043-5
  • Crédits photographiques : © Pablo G. Callejo

Jours de destruction, jours de révolte - Chris Hedges & Joe Sacco

C'est en sillonnant les États-Unis pendant deux ans que Chris Hedges et Joe Sacco ont collecté les témoignages qui nourriront ce reportage accablant sur la civilisation américaine moderne. Déclinant leur travail d'enquête par zone géographique sous la forme de cinq chapitres, les deux compères donnent à voir à travers leur travail, une image souillée du rêve américain. La réserve indienne de Pine Ridge (Dakota du Sud), les mines de Welch (Virginie occidentale), les camps d'ouvriers agricoles d'Immokale (Floride) ou la décharge publique de Camden (New Jersey), sont en effet devenus de sordides ghettos où violence, pauvreté et désespoir font le quotidien de leurs habitants. Pétris de drames humains, ces territoires oubliés des autorités publiques, accusent lourdement une Amérique malade de ses mensonges et ses contradictions...


Jours de destruction, jours de révolte, un ouvrage hybride au ton moralisateur

    © Joe Sacco
 
Chris Hedges et Joe Sacco ne sont pas les premiers à s'être intéressés à la question : parmi les grandes figures qui se sont engagées en faveur des laissés-pour-compte de l'Amérique, citons l'incontournable Howard Zinn, qui avec son Histoire populaire des États-Unis (édité pour la première fois en 1980 et admirablement adapté en BD en 2009), alertait déjà le monde de la situation désastreuse des citoyens américains de "seconde zone" et de la catastrophe écologique causée par la course aux profits. Rien de nouveau donc dans cette démarche du duo Hedges/Sacco exceptés (ce qui n'est pas rien) le caractère inédit de cette collaboration, l'immense valeur documentaire des nouveaux témoignages réunis et la masse colossale d'informations compilée pour les besoins de ce reportage prometteur. Seulement, en plus de prendre le risque d'aborder un sujet déjà intelligemment étudié par d'autres, les co-auteurs (ou leurs éditeurs ?) ont opté pour une ligne éditoriale qui fait peu honneur à leur travail : "essai illustré", "BD essayiste" ou ouvrage illustré (on ne sait pas trop), ce livre au format hybride ne permet pas une lecture fluide à cause du flagrant déséquilibre entre textes et dessins. D'autre part, les propos "ultra-moralisateurs" de Chris Hedges, s'ils dénoncent à juste titre la capitulation des pouvoirs publics américains face à la misère des ghettos et par extension la suprématie des systèmes financiers, finissent par lasser. On a l'impression de regarder un documentaire de Yann Arthus Bertrand dont on reconnait la qualité et la pertinence des images (cf. les quelques planches efficaces de Joe Sacco) mais dont les textes, finissent par devenir insupportables à force de répétitions et de sentences (cf. le prêche presque ennuyeux de Chris Hedges). En fait, cette publication aurait gagné à être harmonisée au niveau des contenus pour rendre vraiment hommage au projet et au message porté... Ceci dit, on ne pourra que reconnaître le bien-fondé de la démarche qui apporte tout de même quelques éclairages et qui s'en remet à la conscience des citoyens...

Cinq lieux, cinq combats menés contre un ennemi commun : la suprématie de l'argent

       © Joe Sacco

Le temps des spolations (chap. I) dépeint le combat des Amérindiens pour la défense de leur droits territoriaux et le paradoxe des réserves indiennes (dont celle de Pine Ridge) où délinquance, violence, et crimes sont légions. Dépossédés de leurs terres, forcés à renier leurs traditions et finalement parqués comme des animaux dans des réserves où règnent désormais les gangs, les descendants de Crazy Horse, Sitting Bull ou Wounded Knee ont perdu toute dignité. Mais pas tous : quelques repentis ou quelques âmes fortes continuent de se battre à l'instar de Mike qui découvre l'éveil spirituel dans les sweat lodges en prison ou Verlyn Long Wolf, qui violée dès son enfance, a gagné son combat contre l'alcoolisme...

Jours de siège (chap. II) donne la voix aux pauvres de Camden (New Jersey) qui fut une ville prospère dans les années 60. Des spéculateurs sans scrupules (cf. l'empire de Norcross) emmenant avec eux la corruption, ont peu à peu paupérisé la ville et laissé dans la misère les pauvres (en majorité les classes ouvrières ou les afro-américains) qui n'ont pas eu les moyens de partir. Analphabétisme, trafic de drogue, prostitution, criminalité frappent cette ville pourtant régie par des multi-millionnaires. Heureusement, cette ville compte encore des Mme Davis ou des pères Doyle qui croient encore que du pire, peut germer le meilleur...

Le temps de la destruction (chap. III) raconte le pillage organisé des ressources naturelles de Virginie occidentale. Après avoir asservis les mineurs et leurs familles pendant des décennies, dévasté des centaines d'hectares de forêts et empoisonné des milliers de personnes pour générer toujours plus de profits, les puissantes compagnies minières continuent de mépriser les conséquences écologiques et sanitaires désastreuses de leurs exploitations en achetant le silence des élus et des puissants. A travers la révolte de Larry Gibson, c'est au récit d'une hécatombe que l'on assiste. Mais Larry est catégorique : ce qui lui donne la force de continuer, c'est qu'il sait que son combat est juste...

Le temps de l'esclavage (chap. IV), on le sait, n'est toujours pas aboli de nos jours. On parle désormais d'esclavage moderne mais que se cache derrière cette expression ? Les champs de coton autrefois prospères grâce à l'esclavage des noirs ont aujourd'hui laissé place aux plantations de tomates qui exploitent honteusement la main d’œuvre issue de l'immigration clandestine. Salaires de misère, conditions de vie déplorables, mauvais traitements, abus sexuels, chantages, les "esclaves modernes" participent à leurs dépends à un système profondément corrompu par l'argent. Nombreux sont ceux qui comme Ana regrettent d'avoir quitté leur pays mais tant que des Lucas Benitez se battront pour leur cause, il reste un infime espoir...

Jours de révolte (chap. V) revient sur la mobilisation collective du mouvement Occupy Wall Street. En 2012, celui-ci inspiré par les révolutions arabes, a soufflé un vent de révolte (aujourd'hui éteint) à travers tous les États-Unis. Comme pour tous les mouvements de contestation populaire, Chris Hedges rappelle à travers cet exemple et d'autres cas historiques, qu'il suffit parfois d'un élément déclencheur inattendu pour réveiller les consciences. Ketchup qui a participé à la mobilisation témoigne avec enthousiasme de l'effervescence qui régne alors à New-York...

Ce dernier chapitre censé clore la série de reportages sur une note optimiste convainc peu : aujourd'hui en 2015, les mouvements contestataires prônant la désobéissance civile s'essoufflent et chacun a repris sa vie. Restent les Mike, Mme Davis, Larry Gibson ou Lucas Benitez et les autres pour qui la lutte demeure une question de vie ou de mort. Plus qu'une dénonciation, cet ouvrage est à mon sens un bel hommage à leur combat...

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  • Titre : Jours de destruction, Jours de révolte
  • Auteur : Chris Hedges
  • Illustrations : Joe Sacco
  • Traducteur : Sidonie Van den Dries (BD) et Stéphanie Dacheville (texte)
  • Éditeur : Futuropolis
  • Date de parution : Novembre 2012
  • Nombre de pages : 304 p.
  • ISBN : 978-2754808767
  • Crédits photographiques : © Joe Sacco


L'éternaute - Alberto Breccia et Hector Oesterheld

L'Éternaute, navigateur de l'éternel, est condamné à parcourir le temps et l'espace à la recherche d'une cause perdue. Tout commence à la fin des années 60 lorsque Buenos Aires est victime d'une invasion extra-terrestre. Par simple contact, une neige assassine a soudainement décimé la plupart des habitants de la ville. Rares survivants de la subite attaque, Juan Salvo, sa femme et sa fille (Hélène et Martha) ainsi que deux de ses amis (Favalli et Lucas), mettent au point des combinaisons isolantes contre la neige mortelle pour fuir leur retraite devenue trop dangereuse... Publiée dans le magazine Gente en 1969, cette série imaginée par Hector Oesterheld et initialement illustrée par Francisco Solano Lopez, a été reprise par le scénariste en collaboration avec Alberto Breccia pour cette version. Censurée à l'époque suite aux mécontentements des lecteurs du magazine conservateur, cette seconde mouture de l'Éternaute (rééditée en France en 1993 par Les Humanoïdes Associés pour la présente édition) accentue le désaveu croissant d'Oesterheld pour la politique argentine d'alors...


Alberto Breccia ou l'explorateur graphique de l'épouvante

"La bande-dessinée n'a jamais eu pour vocation - aux yeux des éditeurs - d'être un média dérangeant. Avec Alberto Breccia, dont le clair-obscur produit sur notre œil l'effet d'une ingestion d'acide lysergique diethylamide, l'épouvante prend corps et, soutenue par un texte d'une efficacité non moins redoutable, annule soudain tous les repères d'une lecture convenue. La structure du récit entame, de la façon la plus traîtresse, ce parcours cauchemardesque au cours duquel le plus rétif d'entre nous perd son assurance." (p.11). Voilà un extrait jubilatoire de la préface de Jean Rivière qui devrait donner l'eau à la bouche à quelques amateurs. De la même façon que pour d'autres de ses œuvres comme Le cœur révélateur ou Dracula (dont je recommande également la lecture), le dessinateur argentin, en insatiable explorateur de l'art graphique, s'est approprié l'histoire en jouant avec les textures, en jonglant avec les techniques et en exploitant les contrastes de noir et blanc avec une maîtrise remarquable (notamment ses superbes peintures au couteau qui se prêtent particulièrement à l'ambiance apocalyptique de l'Éternaute). Et son art qui distille insidieusement le venin de la terreur, sert à merveille un scénario-cauchemar de science-fiction des plus vertigineux...


L'Éternaute, le récit d'une dystopie illustrée ?

Et puisque le succès de ce titre ne tient pas uniquement aux dessins de Breccia, soulignons également l'inquiétant scénario d'Oesterheld. Plus qu'une histoire de science-fiction, l'Éternaute augurait comme une sombre prémonition, l'imminence d'un désastre politique (qui devait causer deux décennies plus tard la disparition brutale du scénariste). Peut-on dès lors parler de l'Éternaute comme le récit d'une dystopie illustrée ? Peut-être que oui, peut-être que non. Toujours est-il qu'il marquera durablement son temps par sa modernité et son côté visionnaire... A (re)lire !

Enfin, si vous voulez vous procurer cette BD, notez qu'elle est disponible sur Amazon via le lien suivant : L'Eternaute 

  • Titre : L'éternaute
  • Illustration : Alberto Breccia
  • Scénario : Hector Oesterheld
  • Préface : François Rivière
  • Éditeur : Les Humanoïdes Associés
  • Date de parution : Octobre 1993
  • Nombre de pages : 62 p.
  • ISBN : 2.7316.1107.6
  • Crédits photographiques : Alberto Breccia

Les cahiers japonais, Un voyage dans l'empire des signes - Igort

"Ce livre est une machine à remonter le temps. Il m'a permis de voyager pendant deux ans à reculons, à l'est de moi-même. De redécouvrir des lieux, de revivre des émotions." (Igort). Peu de lecteurs le savent : cela fait plus de 20 ans que le dessinateur italien s'intéresse au Japon (ayant travaillé pendant onze ans avec Kodansha, son éditeur japonais). Parfois contrarié, souvent surpris mais toujours émerveillé par les codes de ce pays à l'inestimable tradition du dessin, Igort à travers son voyage initiatique au pays du soleil levant, livre quelques clés de décryptage sur cette culture aussi déconcertante que fascinante. Grâce aux somptueuses planches de ces Cahiers japonais inspirés de ses notes, croquis, dessins, mais aussi de ses rencontres et collaborations, Igort invite à une fabuleuse et poétique découverte de la culture nippone : du suicide rituel de Mishima à la légende d'Abe Sada en passant par le cinéma de Kurosawa, le réalisme animé de Takahata, la magie féérique de Miyazaki ou la peinture absolue de Hokusai, ce voyage dans l'Empire des signes (cf. l'essai de Roland Barthes du même nom) est un superbe condensé de ce qui fait la richesse et le mystère du Japon d'Igort...

Les cahiers japonais, le récit de la poursuite d'un rêve

Difficile de rédiger le compte-rendu de cet album sans évoquer l'intention de l'auteur : "Je mentirais si je disais que tout a commencé de façon inattendue. Avant d'y poser les pieds pour la première fois au printemps 1991, je rêvais du Japon depuis 10 ans. C'est à dire que j'avais commencé à le dessiner de manière presque inconsciente dans les pages de ce qui allait devenir ma première BD : Goodbye Baobab. Ce que je cherche ? Cette question m'accompagne désormais depuis presque 25 ans. Progressivement, ce lieu mystérieux m'est entré dans la peau. Langueurs et nostalgie s'installant en moi m'ont même amené à y vivre pendant une courte période, dans les années 90. Ce livre raconte la poursuite d'un rêve et la découverte de cette évidence, à laquelle il faut se rendre, que les rêves, on ne peut pas les attraper." (p.7). Igort entend-il par là qu'au bout de 25 ans, il n'est pas encore parvenu à saisir l'essence profonde de l'esprit japonais ? Dans son dyptique Cahiers russes / Cahiers ukrainiens, on découvrait un Igort militant pour la cause des oubliés. Avec cet album, c'est à un Igort mélancolique que l'on a à faire. Brossant avec lyrisme un Japon torturé par ses propres démons, le dessinateur rend un brillant hommage à l'Empire des signes en racontant sa quête inassouvie...

    Yuri - Igort

Le Japon d'Igort, un fantasme nippon pour bien d'occidentaux

"Le Japon était devenu pour moi l'écrin des désirs et surtout le paradis de tous les dessinateurs". Mais pas seulement aurais-je envie de dire. Et pour cause, si le point de départ de cet engouement d'Igort pour le Japon part de ce constat, son travail a ceci de magique qu'il brasse l'art japonais au sens large : on évoquait plus haut, le dessin (mangas, Ukiyo-e, film d'animations, le Geki-ga de Mizuki), le cinéma (Seijun Suzuki, Kitano), la poésie (l'art du Haiku de Basho), le bushido (code d'honneur des Samouraïs observé par Mishima)... Mais l'auteur aborde aussi le Kiku No Seku (fête du Chrysanthème), la tradition des Sumos, les secrets de l'Iki (code des Geishas basés sur séduction, énergie spirituelle et renoncement), le statut social des Burikamin (caste inférieure japonaise)... en alternant hommages oniriques et anecdotes de vie ou de travail... On découvre ainsi que la collaboration d'Igort avec l'éditeur Kodansha a donné naissance à Yuri, un personnage "sempaï" (mignon) adulé par la population locale. On part également à la rencontre de Miyazaki (Mon voisin Totoro), Tanaka San (Gon), Ozamu Tezuka (Astro le robot) qui ont durablement marqué le dessinateur. Et puis, Igort partage également toutes ces choses qui lui ont appris à évoluer dans l'empire des signes et qui font de ces cahiers, un trésor de lecture, un merveilleux voyage en somme...

     Cahiers japonais - Igort (p.62-63)

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  • Titre : Les cahiers japonais
  • Sous-titre : Voyage dans l'empire des signes
  • Auteur : Igort
  • Traducteur : Laurent Lombard
  • Éditeur : Futuropolis
  • Date de parution : Octobre 2015
  • Nombre de pages : 179 p.
  • ISBN : 978-2-7548-1199-6
  • Crédits photographiques : Igort


Pont-Saint-Esprit, les cercles de l'enfer - Laurent Mantese

L'Affaire du pain maudit qui secoua la ville gardoise de Pont Saint Esprit en cet été de 1951, marque encore les mémoires : histoire d'un empoisonnement de masse, ce sordide fait divers dont les causes restent aujourd'hui mal identifiées, a stimulé bien d'hypothèses et épuisé bien de théories. Les dizaines de victimes de cette catastrophe sanitaire souffraient alors de vomissements et de nausées. Atteints pour certains de violents troubles du comportement (crises d'insomnie, de paranoïa, d'hystérie ou de schizophrénie) et/ou de graves hallucinations, les personnes intoxiquées, ressortiront littéralement traumatisées par cette expérience. Pour ce 2e titre de la nouvelle collection LoKhaLe des éditions de La Clef d'Argent, Laurent Mantese ressuscite les événements en réécrivant l'histoire sous le regard d'un témoin imaginaire, parce qu'une histoire se déroule forcément quelque part et que cette fois-ci, ce sera à Pont Saint-Esprit et pas ailleurs ! (extrait de la 4e de couverture).

Pont Saint-Esprit, les cercles de l'enfer, un récit de fiction troublant traitant d'un fait divers

Maniant à souhait les codes du récit d'horreur, Laurent Mantese s'approprie le fait divers en le racontant de l'intérieur : longues et nombreuses descriptions teintées d'horreur et baignées de malédiction, ambiances lugubres, tensions insoutenables, l'auteur prête à son prétendu témoin des confessions/souvenirs terribles qui font revivre les événements comme si l'on y était. Ainsi qu'il s'en explique dans son avertissement, l'auteur souligne que "ce récit ne cherche pas à convaincre ni à fournir une autre explication aux scènes qu'il décrit" (p.13) et n'a pas d'autre ambition que de rendre hommage aux victimes. Un hommage certes bien rendu mais qui laisse finalement assez peu de place à l'imaginaire : le texte colle en effet "trop fidèlement" aux faits survenus et le caractère du narrateur, témoin imaginaire des tragiques événements, ne s'affirme que trop rarement. C'est bien dommage car l'Affaire du pain maudit avait largement de quoi stimuler les scénarios les plus inquiétants ou inattendus... Un second opus un peu décevant donc pour la collection LoKhaLe qui proposait une fiction plus convaincante avec son Fantôme du mur de Jean-Pierre Favard...

    Coupure de presse du Midi Libre paru à l'époque

L'Affaire du pain maudit, une enquête judiciaire qui peine à déterminer les causes du mal

Ce cas sans précédents aux causes encore indéterminées a durablement secoué les esprits. Pour preuve, plus de 60 ans après les faits, l'affaire intéresse encore médias, auteurs, réalisateurs, journalistes ou scientifiques. L'enquête judiciaire de l'époque qui n'avait donné lieu à aucune cause clairement établie, a ouvert la voie à des théories plus farfelues les unes que les autres. Parmi les principales hypothèses créditées mais non avérées, certains privilégient la piste de l'ergotisme ou de l'intoxication au mercure. D'autres, celle de l'intoxication au LSD par la CIA. L'article de Jean-Pierre Favard "Pont Saint, autour de l'affaire du pain maudit" en fin d'ouvrage apporte quelques éclairages historiques et scientifiques mais le mystère demeure. Bien qu'abracadabrante, je trouve la théorie de l'intoxication au LSD troublante et plausible mais difficile de trancher lorsque les avis des experts continuent de diverger...

Pour aller plus loin, je ne résiste pas à l'envie de vous partager le documentaire réalisé par Olivier Pighetti et diffusé cette année (2015) qui donne matière à relancer les débats...


  • Titre : Pont Saint-Esprit, les cercles de l'enfer
  • Auteur : Laurent Mantese
  • Éditeur : La Clef d'Argent
  • Collection : Lokhale
  • Date de parution : Octobre 2015
  • Nombre de pages : 114 p.
  • ISBN : 979-10-90662-26-1
  • Couverture : Illustration de Philippe et Léo Gontier
  • Conception et mise en page : Philippe Gindre